Le droit de l'urbanisme fait depuis des années l'objet de réformes rapprochées et conséquentes, notamment au niveau de la procédure de contestation des autorisation d'occupation des sols devant le tribunal administratif.
Au-delà des règles largement commentées relatives à la détermination de l'intérêt à agir des requérants ou encore à la possibilité de régulariser à certaines conditions les projets illégaux afin d'éviter l'annulation, des règles spécifiques ont été mises en œuvre au sujet de la contestation des autorisations de construire modificatives, dont les permis modificatifs.
Rappelons que le permis modificatif est celui qui permet, lorsque le permis initial est en cours de validité et que la construction n'est pas achevée, d'apporter des modifications mineures au projet d'origine.
Les conditions de fond se rapportent dès lors à :
- l'existence d'un permis initial en cours de validité (donc n'ayant pas fait l'objet d'une péremption, d'une annulation ou d'un retrait, et se rapportant à une construction non encore achevée),
- l'absence d'atteinte à l'économie générale ou à la conception générale du projet initialement autorisé, ce qui implique que les modifications prévues soient d'une importance limitée au regard des caractéristiques du permis initial, sous peine d'une requalification du permis modificatif en nouveau permis (ce qui conduit en général à son annulation puisqu'il est admis que le dossier de demande de permis modificatif ne contienne pas l'ensemble des pièces requises dans le cadre de l’instruction d'une demande de permis de construire classique : en cas de requalification cela pose problème).
Le permis modificatif s'intègre en quelques sortes au permis initial pour ne former qu'une seule et même décision : il n'a pour effet ni de retirer ni de rendre caduc le permis initial, n'a pas d'incidence sur son délai de validité ni sur celui de recours contentieux à son encontre, pas plus que sur les droits acquis en vertu de cette décision.
Il remplit par ailleurs une fonction d'une importance souvent capitale : la régularisation des vices affectant le permis initial, que ce soit au sujet des vices de forme (procédure) ou de fond (projet).
Cela explique qu'un permis modificatif intervient souvent au cours de la procédure d'annulation du permis initial, aux fins de corriger les vices susceptibles de conduire à son annulation.
C'est là qu'interviennent les dispositions des articles :
* L 600-5-2 du code de l'urbanisme, aux termes duquel l'annulation du permis modificatif ne peut être sollicitée par une partie à l'instance, dans le cas où un recours a déjà été formé devant le tribunal administratif à l'encontre du permis initial et que le permis modificatif a été communiqué dans le cadre de la procédure, que dans le cadre de ladite procédure :
« Lorsqu'un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation intervient au cours d'une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif, cette décision modificative ou cette mesure de régularisation ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance »,
* R 600-5 du même code, concernant un aspect plutôt procédural et technique, selon lequel des moyens nouveaux ne peuvent être soulevés dans le cadre de la procédure à l'encontre du permis modificatif que dans un délai déterminé :
« Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative.
Lorsqu'un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation est contesté dans les conditions prévues à l'article L. 600-5-2, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux à son encontre passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense le concernant ».
Incontestablement la procédure devant le tribunal administratif devient de plus en plus technique en matière d'urbanisme, dans un objectif de favoriser la production de logements donc de restreindre autant que possible les conditions dans lesquelles les autorisations d'urbanisme peuvent être contestées.
Il devient aujourd'hui presque indispensable de faire appel à un Avocat spécialisé, même si cela n'est pas obligatoire, tant cette complexité peut conduire au rejet de certains recours justifiés sur le fond mais ne respectant pas les règles procédurales toujours plus contraignantes édictées ces dernières années.
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne