En application de la loi du 23 mars 2020 (« d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 »), des ordonnances ont été promulguées les 25/03 et 15/04/2020 (n° 2020-306 et 2020-427) par le gouvernement aux fins d'adapter les délais régissant diverses matières, dont le droit de l'urbanisme.
Cela se comprend puisque, le pays ayant été paralysé pendant près de deux mois, de nombreuses difficultés supplémentaires auraient été prévisibles si les délais avaient continué de courir normalement.
L'ordonnance du 25 mars 2020 a, de manière générale, prévu une prorogation des délais devant expirer entre le 12 mars et un délai d'un mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire (article 1er), pour une durée de deux mois après expiration de l'état d'urgence.
Ainsi, « Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période [d'état d'urgence] sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.
Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un droit » (article 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020).
Rappelons qu'à la date du présent article la période d'état d'urgence, devant à l'origine se terminer le 24 mai 2020 en application de la loi du 23 mars 2020, a été prolongée jusqu'au 10 juillet 2020 par la loi du 11 mai 2020.
Pour ce qui est plus précisément du droit de l'urbanisme, les principales mesures sont exposées ci-dessous.
S'agissant tout d'abord de la durée de validité des autorisations d'urbanisme,
la durée de validité des « autorisations, permis et agréments » (autrement dit permis de construire, d'aménager ou de démolir, décisions de non opposition à déclaration préalable), lorsqu'elle devait expirer au cours de la période d'état d'urgence, a été prorogée « de plein droit jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la fin de cette période » (article 3 de l'ordonnance du 25 mars 2020).
S'agissant des délais d'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme, il est prévu que :
« Les délais d'instruction des demandes d'autorisation et de certificats d'urbanisme et des déclarations préalables prévus par le livre IV du code de l'urbanisme ainsi que les procédures de récolement prévues à l'article L. 462-2 du même code, qui n'ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils reprennent leur cours à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée.
Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l'urgence sanitaire est reporté à l'achèvement de celle-ci.
Les mêmes règles s'appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l'instruction d'une demande ou d'une déclaration mentionnée à l'alinéa précédent » (articles 8 de l'ordonnance du 15 avril 2020 et 12-ter de celle du 25 mars 2020).
Autrement dit, les délais d'instruction ou de récolement (vérification de la conformité des travaux à l'autorisation d'urbanisme) qui auraient dû expirer ou commencer au cours de la période d'état d'urgence sanitaire sont suspendus ou reportés à l'expiration de ladite période.
Lorsque le délai aurait dû expirer au cours de la période d'état d'urgence, il est simplement suspendu : il est tenu compte du délai ayant déjà couru et seule la partie restante du délai recommencera à courir à la fin de la période d'urgence.
En revanche, lorsque le délai aurait dû commencer au cours de cette période, il est reporté : il commencera à courir en sa totalité à la fin de l'état d'urgence.
Rien n'empêche toutefois l'administration d'instruire les demandes si elle est en mesure de le faire.
Enfin, s'agissant des délais de recours contre les autorisations d'urbanisme,
« Les délais applicables aux recours et aux déférés préfectoraux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, qui n'ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus. Ils recommencent à courir à compter de la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée pour la durée restant à courir le 12 mars 2020, sans que cette durée puisse être inférieure à sept jours.
Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l'urgence sanitaire est reporté à l'achèvement de celle-ci » (article 8 de l'ordonnance du 15 avril 2020).
Ici encore, une distinction doit être opérée entre :
- les délais expirant au cours de la période d'état d'urgence, simplement suspendus (exemple : l'affichage d'un permis de construire a été opéré avant le 12/03/2020, le délai de recours ayant donc commencé à courir avant cette date),
- les délais commençant au cours de la période d'état d'urgence, faisant l'objet d'un report (exemple : l'affichage d'un permis de construire a été opéré après le 12/03/2020, le délai de recours n'ayant donc pas commencé à courir avant l'état d'urgence).
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne
Victor de Chanville
Avocat au Barreau de Marseille