La loi « littoral » du 3 janvier 1986 a, comme son intitulé l'indique, mis en place un certain nombre d'outils destinés à la protection d'un littoral déjà menacé à l'époque par l'urbanisation, le béton et le mitage.
Ce texte a été codifié au sein du code de l'urbanisme (actuellement aux articles L 121-1 et suivants et R 121-1 et suivants) et s'applique sur le territoire des Communes riveraines des mers et océans, des étangs salés et des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1000 hectares.
Dès lors, si la Commune d'Aubagne n'est pas concernée, des villes proches telles que Marseille, La Ciotat, Saint Cyr sur Mer, Toulon ou encore Hyères le sont.
Concrètement, la loi dont il est question pose un certain nombre de règles dont les principales sont les suivantes :
* sur l'ensemble du territoire communal, l'extension de l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les agglomérations et villages existants ou en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement,
* sur les espaces proches du rivage, le principe consiste en une extension limitée de l'urbanisation, laquelle doit être justifiée dans le plan local d'urbanisme (PLU) ou le schéma de cohérence territoriale (SCOT),
* sur la bande des 100 mètres, les constructions et installations sont interdites en dehors des espaces urbanisés, de même que l'extension des constructions existantes,
* les espaces remarquables, notamment ceux faisant l'objet d'un classement spécifique tel que site classé ou inscrit, Natura 2000 ou ZNIEFF, sont particulièrement protégés, seuls étant admis des aménagements légers lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, leur mise en valeur, notamment économique, ou leur ouverture au public.
Dans ce contexte, il est permis de s'interroger sur l'articulation entre les dispositions
- de la loi « littoral » intégrées dans le code de l'urbanisme,
- des documents supra-communaux tels que les SCOT ou les directives territoriales d'aménagement (DTA),
- des PLU.
La jurisprudence a, bien entendu, eu régulièrement l'occasion de se prononcer sur la question, avec cependant quelques hésitations ou revirements.
Ces évolutions participent à l'intérêt d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 31 mars 2017 (N° 392186), dont il ressort que même si une autorisation d'urbanisme est conforme aux règles du PLU, sa légalité n'en est pas pour autant acquise au regard de celles de la loi « littoral », ce qui peut conduire à son annulation devant le tribunal administratif.
Précision étant faite que les dispositions de la loi « littoral » étaient anciennement codifiées aux articles L 146-1 et suivants du code de l'urbanisme, cités dans l'arrêt puisque applicables à la date de la décision litigieuse, le Conseil d'Etat a jugé que :
« la circonstance [que la] décision respecte les prescriptions du plan local d'urbanisme ne suffit pas à assurer sa légalité au regard des dispositions directement applicables des articles L. 146-1 et suivants » du code de l'urbanisme.
Il avait rappelé au préalable « qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol mentionnée au dernier alinéa de l'article L. 146-1 du code de l'urbanisme, de s'assurer ... de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire de la commune est couvert par une directive territoriale d'aménagement ... ou par un document en tenant lieu [autrement dit un SCOT], cette conformité doit s'apprécier au regard des éventuelles prescriptions édictées par ce document d'urbanisme, sous réserve que les dispositions qu'il comporte sur les modalités d'application des dispositions des articles L. 146-1 et suivants du code de l'urbanisme soient, d'une part, suffisamment précises et, d'autre part, compatibles avec ces mêmes dispositions ».
Les choses paraissent donc claires et, dans certaines hypothèses, un permis de construire ou une décision de non opposition à déclaration préalable pourront être jugés illégaux même si les règles du PLU ont été parfaitement respectées.
Ce n'est pas une exception en droit de l'urbanisme puisqu'il est constant que les règles de certains articles du code de l'urbanisme s'appliquent directement aux décisions d'occupation du sol, par exemple celles de l'article R 111-2 en matière de sécurité ou salubrité publique.
Il est certain, néanmoins, que cela ne facilite pas la compréhension de certaines situations pour les administrés et alimente un contentieux abondant.
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne