Le Conseil d'Etat a réitéré, par un arrêt du 26 novembre 2018 (n° 411991), le principe bien connu dégagé par la jurisprudence « Thalamy » (arrêt du 09/07/1988) se rapportant aux conditions dans lesquelles peuvent être réalisés des travaux sur une construction existante édifiée de manière irrégulière (le plus souvent sans autorisation), tout en apportant une précision bienvenue au sujet du cas dans lequel l'administration n'a pas procédé à un récolement après dépôt de la déclaration d'achèvement des travaux (DAACT).
Ainsi, le principe est formulé par le Conseil d'Etat de la manière qui suit, de manière tout à fait classique :
« Lorsqu'une construction a été édifiée sans respecter la déclaration préalable déposée ou le permis de construire obtenu ou a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé.
Il en va ainsi même dans le cas où les éléments de construction résultant de ces travaux ne prennent pas directement appui sur une partie de l'édifice réalisée sans autorisation.
Il appartient à l'administration de statuer au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'après les règles d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision, en tenant compte, le cas échéant, de l'application des dispositions de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme issues de la loi du 13 juillet 2006, désormais reprises à l'article L. 421-9 de ce code, relatives à la régularisation des travaux réalisés depuis plus de dix ans ».
Nous pouvons noter la référence intéressante aux dispositions de l'article L 421-9 du code de l'urbanisme aux termes desquelles, sauf exceptions (énumérées par l'article, notamment lorsque la construction a été réalisée sans qu'aucun permis de construire n'ait été obtenu alors que celui-ci était requis) : « Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme ».
Cela étant dit, l'arrêt qui nous intéresse innove en prévoyant l'exception suivante :
« lorsque le bénéficiaire d'un permis ou d'une décision de non-opposition à déclaration préalable a adressé au maire une déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux réalisés en vertu de cette autorisation, l'autorité compétente ne peut plus en contester la conformité au permis ou à la déclaration si elle ne l'a pas fait dans le délai, suivant les cas, de trois ou de cinq mois ni, dès lors, sauf le cas de fraude, exiger du propriétaire qui envisage de faire de nouveaux travaux sur la construction qu'il présente une demande de permis ou dépose une déclaration portant également sur des éléments de la construction existante, au motif que celle-ci aurait été édifiée sans respecter le permis de construire précédemment obtenu ou la déclaration préalable précédemment déposée ».
En effet, l'administration ne disposant que d'un délai de 3 mois à compter de la déclaration d'achèvement des travaux pour procéder au récolement, lui ouvrir la possibilité de refuser l'autorisation pour défaut de conformité à une autorisation d'urbanisme précédemment délivrée reviendrait à lui permettre de procéder au récolement sans limite de délai, ce qui n'est pas acceptable notamment au niveau de la sécurité juridique des bénéficiaires d'autorisations d'urbanisme.
Nous pourrons retenir que le principe, dans le cas d'un projet de travaux sur une construction qui n'a pas été autorisée en tout ou en partie, sera de déposer une demande prévoyant la régularisation d'ensemble de la construction sauf si une précédente autorisation a été obtenue et que la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux (DAACT) déposée à la suite des travaux n'a pas donné lieu à contestation de l'administration.
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne