Les baux, qu'ils soient commerciaux, professionnels ou d'habitation, sont à l'origine de nombreux contentieux.
Dans ce contexte et notamment, en cas de conflit entre bailleur et locataire, il peut se poser la question de la détermination de la date de restitution des locaux loués.
Parfois, le bailleur ne peut pas immédiatement reprendre possession des lieux du fait de l'attitude du locataire, ce qui n'a pas forcément de conséquences importantes ou dommageables mais peut en revanche devenir extrêmement préjudiciable si la situation perdure.
En effet, chaque mois écoulé équivaut à une perte de loyers pour le bailleur.
Dès lors, en cas de contentieux, il faut pouvoir déterminer de manière certaine à quelle date les lieux ont été restitués, que le bail ait fait ou pas l'objet d'une résiliation.
Le principe est le suivant : la date de remise des clés au bailleur est réputée correspondre à la libération des lieux, dont il ne peut pas être repris possession, par hypothèse, jusqu'à cette date.
C'est bien entendu au locataire de justifier (notamment en cas de procédure judiciaire devant la chambre de proximité du tribunal judiciaire ou devant le tribunal de proximité, à Aubagne notamment) que les clés ont bien été remises au bailleur.
Même s'il a déménagé, n'accède plus aux locaux et a vidé ceux-ci, le locataire sera tenu du paiement des loyers (ou du moins d'une indemnité d'occupation si le bail a été résilié) s'il ne peut pas rapporter la preuve de la remise effective des clés au bailleur (décharge, procès verbal de constat d'huissier, lettre recommandée AR, etc).
La jurisprudence est constante à ce sujet.
Ainsi, la cour de cassation a récemment réaffirmé le principe en matière de convention d'occupation précaire :
« la société Ouest promotion immobilier a consenti à la société Réunion matériels services une convention d'occupation précaire portant sur un local à usage de bureaux et un hangar avec cour et parking, d'une durée de 23 mois, du 1er juin 2012 au 30 avril 2014 ; que, le 5 juin 2014, elle l'a assignée en paiement d'indemnités d'occupation et en expulsion ;
Attendu que, pour dire que l'expulsion de la société Réunion matériels services et le transport du mobilier lui appartenant est devenue sans objet et ne la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation que pour la période s'étendant du 1er mai 2014 au 14 novembre 2014, l'arrêt retient qu'un constat du 14 novembre 2014 établit qu'elle avait à cette date complètement libéré les lieux loués et que le défaut de restitution des clés, dans ces conditions, ne peut constituer à lui seul l'occupation ouvrant droit à une indemnité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'absence de remise des clés au propriétaire ou au mandataire de celui-ci résultait de ses propres constatations, la cour d'appel a violé le texte susvisé », à savoir l'ancien article 1134 du code civil (décision du 14 novembre 2019).
La 3e chambre civile de la Cour de cassation s'était déjà prononcée depuis longtemps sur la question au sujet des baux d'habitation (loi du 6 juillet 1989) :
« Attendu, selon l'arrêt attaqué (cour d'appel de Nouméa, 3 mai 2007), que Mme X..., qui avait donné à bail un local d'habitation aux consorts Y..., les a assignés après leur départ des lieux pour obtenir leur condamnation à lui payer des loyers et pénalités contractuelles, des frais de remise en état et des dommages-intérêts ; que les consorts Y... ont sollicité à titre reconventionnel des dommages-intérêts pour trouble de jouissance et la restitution du dépôt de garantie ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que les consorts Y... indiquant eux-mêmes dans leurs conclusions que la remise des clefs avait eu lieu le 5 mai 2004, la cour d'appel, sans modifier l'objet du litige et sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a, à bon droit, déduit qu'ils n'avaient quitté les lieux que le 5 mai 2004 et étaient tenus des loyers et pénalités échus entre septembre 2003 et avril 2004 » (arrêt du 06/01/2009).
Les locataires et leurs avocats doivent donc se montrer vigilants à cet égard.
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne
Victor de Chanville
Avocat au Barreau de Marseille