Il résulte des termes de l'article R 111-2 du code de l'urbanisme que le projet faisant l'objet d'une demande d'urbanisme peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations.
Il est régulièrement fait application de ce texte par les communes en matière de risque d'incendie de forêt ou de risque d'inondations, ce qui permet de refuser la demande d'autorisation.
Néanmoins, le refus n'est régulier que si aucune prescription technique n'est envisageable qui permettrait d'écarter le risque ou du moins de le réduire à un niveau acceptable.
Le Conseil d'Etat estime ainsi que « lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modification substantielle nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect ».
De telles prescriptions permettent en substance, lorsqu'un aspect non substantiel (pouvant être modifié sans remettre en cause son économie générale) du projet ne respecte pas une règle d'urbanisme relative à la sécurité ou la salubrité publique (et d'ailleurs dans d'autres cas qui ne sont pas traités dans cet article), d'imposer au pétitionnaire une modification limitée du projet permettant le respect de la règle en question.
Les prescriptions techniques peuvent concerner des points variés : respect de l'avis de tel organisme, accès à aménager, ajout d'un aménagement, augmentation du niveau de plancher bas en cas de risque d'inondation, etc.
De manière générale, il est admis qu'une modification du projet concernant un point précis et d'une ampleur limitée, ne nécessitant donc pas la présentation d'un nouveau projet, peut faire l'objet de simples prescriptions de l'arrêté de permis de construire si elle est indispensable au respect de la réglementation.
Cela évite précisément de devoir présenter un nouveau projet pour une modification mineure ne le justifiant pas.
En cas de litige, il appartient à la juridiction administrative d'apprécier si dans telle hypothèse telle prescription spéciale est envisageable, ce qui a conduit le Conseil d'Etat à rendre récemment un arrêt sur la question aux termes duquel, après avoir rappelé les principes applicables en la matière, le Conseil a jugé que :
« si [le pétitionnaire] soutenait qu'un permis de construire aurait pu lui être légalement délivré au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, compte tenu des caractéristiques du projet et des aménagements supplémentaires envisageables pour réduire les risques relatifs aux incendies de forêt tels que la réalisation de réserves de stockage d'eau, la mise en place d'un dispositif d'arrosage adapté ainsi que le recours à des matériaux et techniques de construction réduisant les risques d'embrasement,
la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que, eu égard aux risques particulièrement élevés que présentait le projet du fait de sa situation au bord d'un plateau dominant un très important massif forestier, tant en ce qui concerne son exposition aux incendies que pour assurer sa défense en cas de sinistre, ni l'existence d'une bouche d'incendie à 80 mètres du projet, ni la réalisation de l'aire de manœuvre prévue dans le dossier de demande, ni même la réalisation complémentaire d'autres équipements envisagés pour renforcer la défense contre l'incendie dont se prévalait le requérant, n'étaient de nature à conduire à regarder le refus opposé par le maire de Tanneron à la demande de permis comme ayant méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
En statuant ainsi par un arrêt qui est suffisamment motivé, la cour a souverainement apprécié les faits de l'espèce sans les dénaturer et n'a pas commis d'erreur de droit ».
L'arrêt est intéressant à la fois en ce qu'il illustre les mesures susceptibles de faire l'objet d'une prescription technique dans le cas du risque d'incendie mais aussi le fait que lorsque le risque est trop important aucune prescription n'est suffisante à garantir la sécurité publique, ce qui justifie le refus de la demande de permis de construire.
Victor de Chanville
Avocat à Aubagne